UN VIAGGIO DI AMORE E DI SCOPERTA CHE RIAPRE A NUOVE CONOSCENZE
- pandavalli
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CERCLE DU LIVRE: "LE CANAPE' ROUGE ", UN VOYAGE D'AMOUR ET DE DÉCOUVERTE
Michèle Lesbre, cette autrice qui nous était inconnue jusqu'à ce samedi 27 janvier 2024 quand nous nous sommes retrouvées pour parler de son livre “Le canapé rouge”, est née à Tours en 1939. Après des études en lettres et histoire à Clermont-Ferrand elle exerce la profession d’institutrice puis directrice d’école maternelle . En 1991 elle se tourne vers l’écriture, d’abord des nouvelles puis des noirs, genre qu’elle abandonne en 2001 pour des récits où l’histoire et les événements traversent, parfois d’une façon douloureuse, la vie d’un personnage. Le canapé rouge est son dixième roman, lauréat du prix Mac Orlan en 2007.
Un coffret rouge imitant le revêtement capitonné des banquettes de certains trains ou de certains fauteuils et canapés, à l’intérieur un petit livre de 136 pages avec en couverture la photo d’un paysage prise par la fenêtre d’un train; on l’extrait, on l’ouvre comme on ouvrirait la porte des souvenirs …. les souvenirs des deux protagonistes Anne et Clémence.
Même si nous avons toutes eu, plus ou moins, du mal à trouver un fil conducteur dans ce roman un peu décousu, la plupart d’entre nous y a trouvé des images, des idées, des thèmes intéressants.
LE VOYAGE:
En premier lieu, le voyage, le long de deux lignes parallèles: l’une, qui partirait d’une photo cachée dans les plis du canapé rouge, qui pourrait être le voyage de Clémence à la recherche d’un amour de jeunesse perdu; l’autre c’est le voyage que Anne entreprend alors dans le transsibérien qui la conduira au lac Baïkal sur les traces de Gyl: même voyage, même train pour retrouver, elle aussi un amour de jeunesse, fini depuis longtemps mais peut-être pas complètement oublié. Au bout de ces deux lignes parallèles, il y aura la mort de Clémence dans la Seine et, aboutissement du voyage introspectif de Anne le renoncement total et définitif à Gyl. “ Je ne courais pas après un vieil amour, mais c’était comme s’il représentait tous les autres…. La vieille dame semblait me suivre dans ce train, je pensais souvent à elle. Nous allions, chacune à sa façon, vers ces instants de nos vies où tout avait commencé.” p. 24
Si le voyage de Clémence est essentiellement le voyage de la mémoire, celui de Anne est un déplacement proprement dit, au rythme du train, avec des rencontres parfois bizarres, des lectures, des nuits sans sommeil, des inconforts, des curiosités, avec les images des paysages de Sibérie qui défilent par la fenêtre, les forêts de bouleaux, les villages, les datchas, les cimetières, les usines abandonnées, les barres d'immeuble….
LES PERSONNAGES FÉMININS
Ensuite, les personnages féminins. D’une part, on a remarqué que Clémence et Anne ont uneÉgrande complicité et beaucoup de points communs malgré la différence d'âge: toutes les deux ont eu une vie amoureuse riche et variée, dominée toutefois par un grand amour, Paul pour Clémence et Gyl pour Anne. Toutes les deux racontent des souvenirs d’enfance; pour Clémence, la rencontre avec Paul en vacances, les longues promenades dans les dunes mais aussi à Paris, pour Anne, un petit chemin de campagne avec des arbres et leur ombre et Grand-mère Jeanne qui connaissait leur langage. D’autre part, chacune apprend beaucoup de l’autre: La liberté et l’acceptation de la vieillesse pour Anne : “Elle m’avait appris la liberté sans laquelle l’amour, bien souvent s’étouffe, s’exaspère, s’étiole.Clémence, malgré la perte de Paul, avait connu cette liberté, grâce à son immense talent pour le bonheur” p. 88 et encore p.44 “Cette femme me donnait peut-être la chance d’apprivoiser ce temps redouté de la vieillesse qui me guettait.” De son côté, la vieille dame , modiste de son état, va se passionner pour les histoires que Anne, la journaliste, deux fois par semaine vient lui lire: “La vie de femmes qui m’étaient chères par leur insolence, leur courage, leur espièglerie parfois, leur destin tragique souvent" p.16
CES FEMMES DEVIENNENT Á LEUR TOUR PERSONNAGES DU ROMAN
Ces femmes deviennent à leur tour personnages du roman:
Marion du Faouët, “la petite effrontée”, femme bandit qui vécut en Bretagne au 18e siècle p. 111 - 112; Olympe de Gouges “encore une délurée qui a mal fini” auteure du premier manifeste féministe La déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, décapitée en 1793 p. 79 - 80;
Anita Conti, exploratrice et photographe du 20e siècle.
Milena Jesenska, journaliste tchèque, amie de Kafka, morte dans le camp de concentration de Ravensbruck en 1944 p. 95,96,97.
Milena était la préférée de Clémence, fascinée par le récit de la traversée à la nage de la Moldau pour rejoindre son amoureux contre le gré de son père. Peut-être a-t-elle voulu l’émuler? “Ce fol élan vers un homme aimé la ravissait. J’imaginais qu’elle avait eu cet élan, j’en étais même certaine. Elle avait plongé dans l’eau pour rattraper tout ce temps sans Paul, elle le rejoignait, c’était le rendez-vous qu’elle attendait depuis si longtemps.” p.129
Comme le dit Clémence, ces femmes du passé et elles deux auraient formé “une jolie bande” p. 80
Enfin, l'ombre de Camille Claudel plane aussi sur le destin de ces femmes. D’une part, par le biais de la plaque qui rappelle aux passants que Camille Claudel avait habité et travaillé quai Bourbon près du pont Louis-Philippe où Clémence s’était laissée aller à l’eau, d’autre part, par la phrase qu’elle avait écrite à Rodin: “Il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente” p.132. Impossibles à rapprocher ces deux femmes même si toutes deux avaient attendu en vain un Paul, l’une , Clémence, “encore dans l’idée du bonheur, dans l’amour de la vie…” l’autre, Camille, dans “ son exil affectif, sa soumission au malheur.. “ p.132
Pour clore ce cercle féminin, la petite fille, coiffée d’un chapeau à voilette, assise dans le canapé rouge à la place occupée autrefois par Clémence, à qui elle ressemble beaucoup, dans la même position…. “La petite effrontée” p. 125
Les figures féminines sont donc dominantes dans ce roman et étroitement liées les unes aux autres. Quant aux personnages masculins, on peut dire qu’ils ne nous ont pas particulièrement interpellées .
Gyl, grand amour de jeunesse et compagnon de lutte, venu s’installer au bord du lac Baïkal où il fabrique des cerfs-volants pour les enfants et où sa femme Irina mettra au monde leur enfant . Enfant auquel Anne et lui avaient renoncé des années auparavant.
Igor, que Anne rencontre dans le train, Igor le silencieux qui lui offre une assiette de soupe au chou, signe “qu'il acceptait sa présence” p.49. Un lien étrange va s’établir entre eux: “ un guide, un ange discret….. un de ces êtres qui semblent ne pas se trouver sur votre chemin par hasard, mais par une sorte d’évidence si bouleversante que votre existence en est subitement transformée. “ p.51
Boris, rencontré au café Globus où il déchaine l’assistance avec sa voix et son accordéon. Avec lui, elle instaure un véritable dialogue, une amitié, ce qui permet au lecteur de mieux connaître ce personnage, son séjour dans une région polluée au nucléaire, l’infirmité de sa fille, sa séparation ( p. 90 à 94) “ J’étais bien avec cet homme….Nous avions marché jusqu’au fleuve comme deux vieux amis que le silence n’inquiétait pas Cette rencontre donnait un souffle au voyage, une respiration, quelque chose de simple, de quotidien” p.92
CONCLUSION:
En conclusion, quelques mots sur les poèmes cités dans le roman. Tout d’abord les deux textes russes: Souliko, ce chant que Anne entend souvent à Irkoutsk et qui lui rappelle Gyl. Un poème d’amour, le chant préféré de Staline; dans le roman c’est le chant de douleur d’une femme dont les deux fils sont morts au combat en Afganisthan et qui raconte un homme à la recherche de la tombe de sa bien-aimée. Les collines de Mandchourie, chant à la mémoire des soldats morts pendant le conflit russo-japonais qui sera le prétexte à l’amitié de Boris.
Enfin, les trois strophes du poème de Nazim Hikmet - poète turc, comuniste romantique, du début du 20e siècle , images du temps qui passe, inexorable pour tous, “ le platane, moi, le chat, le soleil et puis notre vie”
Mais pourquoi avoir ajouté la toute dernière page? Nous, nous aurions préféré que le livre se termine sur ces simples images.
(M.T.)
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